Au Maroc, le champ professionnel de la formation d'enseignants de français se trouve de plus en plus absorbé par l'université, notamment à travers les nouvelles Écoles Supérieures d'Éducation et de Formation (ESEF), remplaçant les anciennes Écoles Normales Supérieures (ENS). Cette réforme est liée en grande partie à un changement de perspective dans l'appréhension des liens entre recherche et formation. Dans le cadre de la nouvelle « licence en éducation, spécialité enseignement du français au secondaire » (se substituant à la « licence fondamentale en études françaises »), ou encore des masters en didactique du français, une place importante est accordée à la recherche dans la construction de l'identité professionnelle des enseignants en formation (El Gousairi, 2023).

 De fait, les relations, nombreuses et anciennes, entre recherches didactiques et formation des enseignants ne sont plus à démontrer (Garcia-Debanc, Mauroux & Paolacci, à paraitre). Que cette formation doive être éclairée par des savoirs construits par les recherches, cela semble aller de soi, en raison même de l'enjeu social de la didactique du français qui s'est engagée, à ses origines, contre l'échec scolaire, en œuvrant au questionnement et au renouvèlement des pratiques enseignantes, ou encore à la description et la construction d'outils théoriques et pratiques à destination des formateurs d'enseignants. Dès lors, comment penser, dans le cadre du symposium, le continuum entre recherche et formation en didactique de la littérature ?

En privilégiant une entrée par les savoirs objectivés en formation (Dolz & Gagnon, 2021), nous proposons ici d'explorer la manière dont la formation des enseignants de français au Maroc se situe par rapport aux recherches sur la lecture littéraire. Il s'agit précisément d'aborder la question des modèles didactiques sélectionnés en lien avec l'objet « lecture littéraire » et de leur intégration dans les pratiques préprofessionnelles des futurs enseignants : comment le concept de « lecture littéraire » est transformé en objet de formation ? Comment les formateurs s'en saisissent ? Quels modèles didactiques sont particulièrement sollicités autour de l'objet ? Comment sont-ils recontextualisés et rendus accessibles pour développer des compétences professionnelles ? Quelle réflexivité est travaillée à partir de la problématisation de ces modèles ? Enfin, que révèlent ces pratiques déclarées de l'activité des enseignants en formation et leurs manières de s'approprier la lecture littéraire et les modalités de son enseignement ? Après une brève analyse des programmes de formation, nous discuterons les résultats d'une enquête exploratoire par questionnaire, menée auprès de 20 formateurs d'enseignants du secondaire, intervenant dans différentes ESEF.

Bibliogaphie

Dolz, J., & Gagnon, R. (2021). Vulgarisation scientifique ou transposition didactique ? Une réponse par l'analyse des pratiques de formation. Repères, 63, 105-122

El Gousairi, A. (2023). Résultats de recherche en didactique du français et contenus de formation des enseignants. Quelles interactions, quelles transformations ?, In : J.-L. Dufays (dir.). Les recherches en didactique du français : les résultats en question(s) (pp. 39-52). Presses universitaires de Louvain. 

Garcia-Debanc, C., Mauroux, F. & Paolacci, V. (à paraitre). Modèles en didactique du français et formation des enseignants. Interroger les pratiques d'enseignement et de formation de la maternelle à l'université. Repères, 71.