Co-construction de la réflexivité des enseignants de maternelle multilingue : analyse des discussions lors de réunions de travail.
Laure Sauvage  1@  
1 : Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3
DILTEC – EA2288

Dans une perspective interactionniste, un enfant apprend une première ou une autre langue en participant à divers discours au sein des différents groupes sociaux auxquels il appartient. Les activités proposées par les adultes médiatisent ce rapport au discours (de Weck & Salazar Orvig, 2019 ; Vasseur, 2005). 

L'équipe enseignante de maternelle d'un établissement membre du réseau de l'Agence pour l'Enseignement Français à l'Étranger (AEFE) dans une province anglophone au Canada, cherche à concevoir et à mettre en place des dispositifs (Cordeiro et Schneuwly, 2017) visant à soutenir la production orale des élèves. Il s'agit en effet de construire à la fois leur répertoire linguistique en français ainsi que leur compétence plurilingue (Coste, 2008). 

Les enseignants et les enfants de cinq classes ont donc été filmés au cours de divers dispositifs. Ces enregistrements ont été visionnés et discutés avec les cinq enseignants participant à cette recherche collaborative au cours de réunions de travail. Les réunions représentent un corpus longitudinal sur deux ans d'une durée de cinq heures. Certaines interventions sont monologales et d'autres s'appuient très fortement sur les interventions d'autres participants (Asmub & Svennevig, 2009 ; Ford, 2008). Les discussions sont déclenchées par divers outils : le visionnage d'un enregistrement, la transcription des interactions, le souvenir de la séance...Ces données ont été recueillies dans le cadre de ma thèse en cours. J'endosse deux rôles dans cette recherche, à la fois celui de doctorante et d'enseignante. 

J'analyse dans un premier temps les limites identifiées par les professionnels concernant leurs conduites d'étayage ainsi que leurs réflexions concernant les réactions des élèves au cours d'un dispositif. Les analyses portent dans un second temps sur les variations proposées pour aller au-delà des limites identifiées. Sous l'impulsion de la dynamique entre ces limites et ces variations, déjà décrite par des chercheurs dans de nombreuses organisations (Haapasaari, Engeström et Kerosuo, 2013), les enseignants ont pensé et mis en place de nouveaux dispositifs dans leurs classes mettant la dimension discursive au cœur des pratiques. 

L'étude de ce corpus de réunions me permet de mettre en valeur une conscientisation émergente du rôle de la tâche sur la participation des élèves et sur les discours produits. Par ailleurs, la comparaison des discours des enseignants sur leur étayage avec les conduites d'étayage observées en classe montre que les pratiques sont bien plus précises et variées que ce que laissent entrevoir les verbalisations au cours de ces réunions. Ces résultats m'amènent à réfléchir aux différentes médiations afin de favoriser l'expertise des enseignants dans le domaine des usages du langage (Vinel et Bautier, 2020). 

 Bibliographie

 

de Weck, G. (2005). L'appropriation des discours par les jeunes enfants. In B. Piérart, Le langage de l'enfant. Comment l'évaluer ? (p. 179‑193). De Boeck Supérieur.

Cordeiro, G. S., & Schneuwly, B. (2007). La construction de l'objet enseigné et les organisateurs du travail enseignant. Recherche & formation56, 67‑80. 

Vinel, E., & Bautier, E. (2020). Des échanges langagiers dans la classe pour construire des usages cognitifs du langage et réduire les inégalités scolaires. Swiss Journal of Educational Research42(3), 557‑568. 

 


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