Cette contribution est issue d'une recherche doctorale en cours qui a pour objet fondamental l'analyse des « notes de lecture » (désormais NL) des élèves à la rencontre d'extraits littéraires en classe de français au secondaire. Par « notes de lecture », nous entendons ici les « écrits de travail » ou les « écrits intermédiaires » (Chabanne et Bucheton, 2002), produits par les élèves en situation de lecture (par exemple, Le Goff, 2011 ; El Gousairi, 2024), ces écrits étant médiés par des « outils » ou des « instruments » d'enseignement déployés en classe (Ronveaux, 2022). En effet, l'idée est que lire, « c'est écrire sur le texte, s'en approprier l'espace graphique et le transformer, à mesure que s'étoffe la réflexion du lecteur et se déploie son activité langagière » (El Gousairi, 2024, p. 133). Dans une « perspective compréhensive » (Bautier, 1995), il s'agit en effet d'aborder ce que les élèves font réellement en lisant des textes littéraires, ce qu'ils écrivent concrètement, comment ils négocient, au moyen des NL, leur compréhension des textes, quelles postures de lecture ils adoptent, mais aussi d'examiner les significations dont sont porteuses ces traces ou ces brouillons de lecture (Alcorta, 2001). 

En portant un intérêt particulier aux pratiques de lecture effectives des élèves, et la manière dont ces pratiques se développent par la médiation d'outils et d'instruments mobilisés en classe, dont notamment le « carnet de lecture » (Ahr et Joole, 2013), cette communication se propose plus précisément d'analyser la nature de cette activité de lecture littéraire et les formes scripturales qu'elle revêt, et de montrer, en amont, en quoi les pratiques enseignantes favorisent ou non le développement des NL et leur objectivation par les élèves. À cet effet, les NL sont saisies ici comme une « écriture de la réception » (Le Goff, 2011), à travers la laquelle les élèves donnent, en quelques mots, une forme écrite à leur compréhension.

En nous appuyant ainsi sur un corpus de NL recueillies dans 16 carnets de lecture d'élèves en première, produites dans le cadre d'une expérimentation autour d'extraits de La Main (1883), une nouvelle de Guy de Maupassant, il s'agit de questionner la matérialité discursive de ces NL et de voir ce qu'elles disent des pratiques langagières des élèves, de leurs manières de lire. Comme les NL sont caractérisées par l'intrication de la lecture et de l'écriture, l'analyse portera sur des actions opérées sur le texte lu par l'« activité fictionnalisante » de l'élève (Langlade, 2007). En amont de cette analyse exploratoire, l'accent sera mis sur les postures d'enseignement ou les gestes professionnels soutenant cette forme spécifique d'écriture de la réception en classe. 

Références bibliographiques 

Ahr, S., et Joole, P. (Eds.). (2013). Carnet/Journal de lecteur/lecture : Quels usages, pour quels enjeux, de l'école à l'université ? (Vol. 25). Presses universitaires de Namur.

Alcorta, M. (2001). Utilisation du brouillon et développement des capacités d'écrit. Revue française de Pédagogie, 137, 95-103.

Bautier, É. (1995). Pratiques langagières, pratiques sociales. L'Harmattan.

Chabanne, J., et Bucheton, D. (2002). Parler et écrire pour penser, apprendre et se construire L'écrit et l'oral réflexifs. Presses universitaires de France. 

El Gousairi, A. (2024). Lire, c'est écrire. Notes de lecture, brouillons de lecture, traces d'apprentissage d'étudiants à l'université. In C. Scheepers (Éd.), Former à lecture, former par la lecture dans l'enseignement supérieur (pp. 133-147). De Boeck supérieur.

Langlade, G. (2007). La lecture subjective. Québec français, 145, 71-73.

Le Goff, F. (2011). La question du support dans les apprentissages : le cas du Grand Brouillon. Recherches, 55, 65-87.

Ronveaux, C. (2022). Expliquer pour réputer, intriguer pour comprendre. Des instruments d'enseignement en transformation. Recherches, 76, 145‑157.