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La conceptualisation en grammaire, entre intentions et pratiques : une problématisation à partir de l'exemple du groupe nominal
Ecaterina Bulea Bronckart  1@  
1 : FPSE, Université de Genève

Le propos de cette communication est de réfléchir aux conditions et aux modalités de mise en œuvre du processus de conceptualisation en grammaire. Plus précisément, nous nous intéressons à la manière dont les pratiques enseignantes offrent (ou non) aux élèves des espaces propices à la conceptualisation grammaticale ou à la construction des savoirs grammaticaux en tant que concepts (Ulma, 2016), ce qui implique, outre l'utilisation du métalangage et l'exemplification correctes, l'établissement de rapports pertinents entre ces savoirs.

Dans la première partie de la communication, nous dresserons un bref panorama de l'intérêt porté à la conceptualisation en didactique de la grammaire, allant de l'exploitation du couple vygotskien « concepts quotidiens - concepts scientifiques » (Vygotsky, 1997/1934) à la reprise de la structure du concept telle que décrite dans les travaux de Barth (1987), en passant par les raisons et les conditions de l'élaboration des « exercices de conceptualisation » par Besse dans les années 1970 en français langue étrangère (Besse, 1974). Cette première approche nous permettra de définir la conceptualisation et de préciser l'acception que nous en retenons ; mais également de constater dans la littérature des usages hétérogènes, plus ou moins rigoureux ou « allant de soi », se distribuant entre une attention portée plutôt au processus (la conceptualisation) ou plutôt aux résultats (les concepts) — mais néanmoins consensuels sur le rôle crucial de ce niveau de traitement des objets grammaticaux. 

Dans la seconde partie, nous nous centrerons sur une collection de pratiques de classe, issues d'un projet de recherche romand portant sur l'enseignement grammatical. Un des volets de cette recherche a consisté en l'élaboration et l'expérimentation de séquences d'enseignement, dont une des phases, intitulée « conceptualisation », mobilisait tout particulièrement une approche qui déplie les caractéristiques définitoires de l'objet grammatical en jeu, en sollicitant une attitude réflexive ainsi que l'utilisation d'un artefact matériel spécifique, appelé « outil de conceptualisation ». L'analyse porte sur 6 classes de niveau 7-8e primaire (élèves de 11-12 ans), ayant utilisé un support d'enseignement identique. Elle fait ressortir notamment un investissement hétérogène de cet outil de conceptualisation par les enseignant-es, allant d'un usage proche des intentions didactiques de la séquence fournie (impliquer les élèves, les rendre actifs, solliciter leur réflexion au fur et à mesure, personnaliser les exemples à noter, etc.) à un simple espace pour écrire des constats. L'analyse fait ressortir également la place très variable donnée aux rapports entre les savoirs visés, en l'occurrence les constituants obligatoires et les constituants facultatifs du groupe nominal (nom - compléments du nom de différentes formes).

Nous discuterons, pour clore, cette hétérogénéité des pratiques : si celle-ci est, en soi, peu surprenante, il devient intéressant d'interroger la mesure dans laquelle elle témoigne de la disponibilité des enseignant-es à engager les élèves, et à s'engager avec eux, dans une forme de construction de savoirs qui s'éloigne potentiellement de leurs « modèles disciplinaires en actes » (Garcia-Debanc, 2007 ; 2021).

Trois références:

Barth, B.-M. (1987). L'Apprentissage de l'abstraction. Paris : Retz.

Besse, H. (1974). Les exercices de conceptualisation ou la réflexion grammaticale au niveau 2. Voix et Images du CREDIF, n° 2, Nouvelle série, pp. 38-44.

Ulma, D. (2016). Construction de savoirs grammaticaux et conceptualisation, Le français aujourd'hui,192, 97-106.


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